Dans une ville faite de solitude et de violence, des personnages qui ne se connaissent pas vont se croiser, s’aimer, se disputer. Un évènement central va les relier : l’explosion d’un immeuble dans un curieux attentat au début de la semaine.
Une ronde de séquences qui s’assemblent comme un puzzle pour reconstituer sur différents registres le portrait collectif d’une humanité en prise avec la difficulté d’aimer et de vivre ensemble.
extrait :
ALBERT
Vous voulez boire quelque chose ?
AYA
J’ai pas fini, merci.
Albert hèle la patronne.
ALBERT
Je vais prendre une bière.
LA PATRONNE
D’accord.
Il fixe une télé dans un coin, allumée mais sans aucun son.
La patronne lui apporte une bière. Il en boit une gorgée.
ALBERT
C’est terrible.
AYA
Qu’est-ce qui est terrible ?
ALBERT
L’attentat.
AYA
Quel attentat ?
ALBERT
Comment, vous êtes sérieuse ?
Vous ne savez pas ?
AYA
Non.
ALBERT
Il y a eu un attentat.
AYA
Il a fait des victimes ?
ALBERT
Douze morts.
C’est bizarre que vous ne soyez pas au courant, on ne parle que de ça depuis trois jours.
AYA
C’était où ?
ALBERT
Dans une tour pas loin d’ici, à l’angle avec la grande rue.
AYA
Il a été revendiqué ?
ALBERT
Pas encore. La Police enquête.
Vous n’avez pas la télé ?
AYA
Non.
ALBERT
Ça ne vous manque pas ?
AYA
Non puisque je vous rencontre et que vous me racontez la télé.
ALBERT
Mais comment vous saviez que vous alliez me rencontrer ?
Aya sourit.
ALBERT
Vous aimez lire alors ?
J’ai commencé un livre justement qui parle d’un homme qui rencontre une femme dans un bar et...
Aya lui coupe la parole. Elle s’adresse à la patronne.
AYA
S’il vous plaît, qu’est-ce que c’est cette chanson que l’on entend ?
LA PATRONNE
C’est un vieux tube d’il y a vingt ou trente ans.
AYA
Il s’appelle comment ?
La patronne va chercher la pochette du disque.
LA PATRONNE
C’est « Pardonne-moi » d’Anita Perroni.
AYA
La chanteuse s’appelle comment ?
LA PATRONNE
Anita Perroni. Attendez je vais vous écrire le nom sur un papier.
La patronne griffonne quelque chose sur un papier qu’elle tend à Aya.
Dany et la femme au chapeau s’accoudent au comptoir.
DANY
On vient ici car dès qu’on s’assoit on n’est pas servi.
LA PATRONNE
J’ai une sciatique.
DANY
Et moi j’ai soif.
La patronne ronchonne.
LA PATRONNE
Qu’est-ce que vous voulez ?
DANY
Un whisky, et pour Madame ? Mademoiselle ?
FEMME AU CHAPEAU
Mademoiselle.
Un verre de blanc.
DANY
Un verre de blanc pour Mademoiselle !
AYA
J’avais jamais entendu cette chanteuse...
ALBERT
En même temps elle n’a fait qu’un tube.
DANY
Vous êtes encore là vous ?
ALBERT
Oui.
FEMME AU CHAPEAU
Il paraît qu’elle est partie faire sa vie au Japon.
AYA attentive aux paroles
Elle demande pardon...
DANY
Oui, c’est ce genre de chansons masochistes.
AYA
Elle a dû faire quelque chose de terrible.
DANY
Elle l’a trompé.
AYA secouant la tête
Non c’est autre chose.
Elle serait différente si elle l’avait trompée, elle serait honteuse. Elle, elle n’est pas honteuse.
FEMME AU CHAPEAU
Qu’est-ce qu’elle a fait alors ?
AYA
Elle est triste...
Elle a cessé de croire en lui, voilà ce qu’elle a fait.