Olive est une jeune femme atteinte d’un trouble singulier : elle est persuadée d’être aimée par Simon, un ostéopathe venu la consulter, avec qui elle tisse une relation imaginaire. Elle lui écrit, lui envoie des cadeaux et le suit à la trace. Tous les signes qu’il lui adresse en retour, même le silence ou le refus, sont perçus par Olive comme une preuve de son amour pour elle.
Une fable poignante, empreinte d’humanité, qui interroge notre capacité à accompagner une personne à la dérive, victime d’un trouble psychiatrique difficile à diagnostiquer.
Extrait :
6. CHASSEUR D'ORAGE
Chez Olive.
Olive, Prune et Victor.
Olive termine de jouer du piano.
Prune et Victor applaudissent.
OLIVE : Bon là j'ai pas la suite mais c'est ce morceau là qu'ils ont passé à la fin de l'émission.
PRUNE : C'est dingue, c'est comme si c'était ton père qui t'avait envoyé Simon !
OLIVE : Oui ! C'est un signe, non ? Et comme par hasard il a fait tomber sa carte de visite chez moi avec son mail dessus.
VICTOR : C'est le principe d'une carte de visite qu'il y ait le contact dessus.
OLIVE : Il a fait tomber sa carte exprès, c'est ça que je dis. Il voulait que je lui écrive !
PRUNE : Et tu lui as écrit ?
OLIVE : Évidemment !
VICTOR : Tu me fais rire.
PRUNE, à Victor : Tu crois plus en l'amour ?
VICTOR, à Prune : Si.
PRUNE, jouant : Mais non !
VICTOR, jouant : Mais si !
OLIVE, lit la carte de visite : « Simon Rivière : Président de la Communauté des chasseurs d'orages francophones ! »
VICTOR : Chasseur d'orage ?
OLIVE : Oui ! C'est des personnes qui suivent les orages, qui les traquent pour les prendre en photo. Ils peuvent même faire plusieurs centaines de kilomètres pour en attraper un ! J'ai passé la nuit entière à faire des recherches. C'est beau. C'est fou ! Et c'est là que j'ai trouvé l'interview radio où il parle de ça. Il est connu, il a une voix incroyable !
PRUNE : « Chasseur d'orage », on dirait un roman ! Ça ne m'étonne pas du tout que ça te plaise.
OLIVE : Et il est président, donc il a beaucoup d'expérience dans la chasse.
VICTOR : Il a surtout beaucoup d'expérience en tant qu'ostéopathe.
PRUNE : Mais oui c'est incroyable. T'as plus du tout mal ?
OLIVE : Non ! C'est un génie.
VICTOR : Regarde-moi ça, comme elle sautille !
PRUNE : Ça, ce n'est pas l'ostéopathie, c'est l'amour !
OLIVE : Je confirme. Il m'a posé énormément de questions sur moi, sur ma vie. Et la manière dont il m'a touchée... Il a même chuchoté mon prénom à l'oreille.
PRUNE, riant : Non ?!
OLIVE : Si !
VICTOR : En pleine séance ?
OLIVE : Bon mais je l'ai dit à Adrien, il était inquiet comme d'habitude.
VICTOR : Pourquoi inquiet ?
OLIVE : Parce qu'il connaît la femme de Simon.
VICTOR : Ah... C'est une information que j'avais pas.
OLIVE : L'amour c'est encore plus beau quand c'est compliqué.
VICTOR, taquin : T'as lu ça dans tes bouquins ?
OLIVE, riant : Eh bien oui et je vais en profiter pour reprendre le mien !
PRUNE : Tu t'es remise à écrire ?
OLIVE : Oui. C'est grâce à lui.
PRUNE : Je suis trop fière de toi.
VICTOR : Tu vas le revoir ?
OLIVE : Il m'a dit qu'il en avait envie.
VICTOR : Attends de voir le premier rendez-vous, on en reparle après.
PRUNE : Oh mais qu'est-ce que t'es chiant !
OLIVE : Victor, je te promets que si t'avais pu voir la manière dont il m'a regardée, tu comprendrais de quoi je parle. C'est comme si ses yeux avaient ouvert une petite porte au fond de mon âme et qu'un vent violent s'était engouffré entre nos deux corps.
LA VOIX : Un vent qui aurait tout renversé. Toutes les choses poisseuses de ton intérieur ont été ravagées par l'orage qu'il a créé dans ton ventre.
Simon entre.
LA VOIX : Tu es maintenant au bord du précipice, et tu veux t'y jeter, les yeux fermés.
Prune et Victor sortent.
(…)