Alex, Gaby, Angèle, Féfé, militants anarchistes, montent un réseau de cambriolages politiques quasi industrialisé pour une redistribution plus juste des richesses. Leur folle épopée s’arrêtera le jour de leur arrestation. Que reste-t-il de leurs luttes en nous ?
Une fiction documentée d’après la vie d'Alexandre Marius Jacob et l’action des Travailleurs de la nuit. Une narration libre mêlant les genres et les époques pour un jeu théâtral inspiré.
Extrait :
1
ÉLOGE I
Alex – “La vie est une guerre.”
Un temps.
“Que l’on combatte pour un mot, pour une idée, pour un drapeau, pour un intérêt prosaïque ou pour un intérêt idéologique, que l’on soit Sancho Pança ou Don Quichotte, il faut toujours donner des coups et en recevoir. Cela est inéluctable, cela ne changera jamais. Donc, il ne faut pas se laisser aller à ce pessimisme lamentable de la désolation.”
Un temps.
Féfé – Alexandre Marius Jacob.
Un temps.
Angèle – J’avais envie de… – oui pardon : bonsoir… Pardon… J’ai perdu le fil pardon –
Alex – J’avais envie.
Angèle – Oui.
(Merci). J’avais envie de… partager avec vous une réflexion qui… m’a habitée, je crois, en préparant ce mot. Une question s’est… imposée à moi et… C’est la question de la cohérence.
Alex. Je sais pas si on peut aller plus loin que toi. Je ne sais pas si on peut être plus cohérent que toi dans sa vie.
Aujourd’hui j’avais envie de le dire. Que ce soit dit. Comment c’est dur de tenir ça. Comment on est rempli de paradoxes. Comment c’est plus simple après tout de faire des arrangements
– avec le monde et avec soi-même – que ça demande des – oui je dirais des sacrifices – d’être cohérent jusqu’au bout. Fidèle à ses convictions.
J’ai l’impression que rentre toujours dans l’équation le… le risque – oui, la question du risque
– et de la facilité, et que… et qu’on place chacune, chacun on place notre limite où on peut.
Qu’est-ce que je suis prête à faire ? Jusqu’où je suis prête à aller ? Quand est-ce que je ne peux pas, que c’est trop ? J’ai l’impression qu’avec toi rien n’est jamais trop et… voilà, Alex j’avais envie… quand je pense à toi c’est cette question comme ça qui me vient. C’est ta cohérence en fait. Et pour ça je voulais te remercier.
Alex – Merci Angèle.
Angèle – Merci.
Un temps.
Féfé – Un jour, je te rencontre, Alex. Et… beaucoup de choses changent. La couleur du ciel.
La valeur de la vie. Le sens des mots. L’amitié.
Avant je traversais la vie comme je pouvais mais quand je te rencontre du jour au lendemain très vite très très vite les choses changent. Et je sais, instantanément je sais que plus rien ne sera plus comme avant. Que je viens d’entrer dans un monde dans lequel tout a un poids. Et dans lequel je ne peux plus faire comme si je ne savais pas. Et que je ne peux plus reculer.
Alors, mon ami, à la vie.
Angèle – Aux amis.
Un temps.
Alex – Aux amis –
Gaby – Je sais pas si vous vous êtes déjà demandé ça, vous.
Mini temps.
Parce que j’ai l’impression que je me suis toujours demandé ça, mais sans me le formuler comme ça mais aujourd’hui oui : Pourquoi est-ce que je me sens profondément inadaptée à ce monde ?
Pourquoi je me sens inadaptée à ce monde ? Pourquoi ?
Alex, tu t’es déjà demandé ça ?
(…)